La lente érosion des médias traditionnels face à l’ascension des réseaux sociaux

par | Oct 30, 2025 | Non classifié(e) | 0 commentaires

 

En Suisse, comme ailleurs, les habitudes d’information se transforment rapidement. Selon une étude du centre de recherche fög de l’Université de Zurich publiée en 2024, plus de 40 % des jeunes Suisses de moins de 25 ans s’informent désormais principalement via les réseaux sociaux, contre à peine 15 % il y a dix ans. Cette tendance, confirmée par plusieurs médias suisses comme la RTS, illustre un basculement profond : la télévision, la presse écrite et même la radio perdent du terrain au profit d’Instagram, TikTok, ou encore YouTube, qui redéfinissent la manière dont les citoyens perçoivent et consomment l’information.

Ce déplacement d’audience trouve ses racines dans plusieurs facteurs complémentaires. D’abord, le rapport au temps et à la proximité de l’information a radicalement changé. Là où les médias traditionnels imposent un rythme de publication ou de diffusion, les réseaux sociaux offrent un flux continu, instantané et personnalisé. Le public, surtout jeune, recherche une information rapide, adaptée à ses centres d’intérêt et délivrée dans un format court et visuel souvent la viralité suppléée la qualité et l’esprit critique. Ensuite, la désintermédiation de la parole joue un rôle central : les influenceurs, créateurs de contenu et citoyens peuvent désormais produire et partager leurs propres récits, contournant les filtres éditoriaux classiques. Enfin, la gratuité de l’accès accentue l’écart : alors que la presse peine à convaincre les lecteurs de payer pour du contenu en ligne, les plateformes sociales offrent une infinité d’informations perçues comme « gratuites », bien que monétisées autrement par la publicité et les données personnelles.

Ce basculement vers les réseaux sociaux comporte des avantages indéniables mais aussi des risques préoccupants. Du côté des atouts, cette évolution démocratise la prise de parole et permet une pluralité de points de vue autrefois difficilement accessibles. Elle renforce aussi la réactivité collective : un événement local peut désormais être connu dans le monde entier en quelques minutes, sans attendre les éditions du soir. Cependant, cette liberté s’accompagne de nouvelles fragilités. Les algorithmes de recommandation, conçus pour maximiser l’engagement, favorisent souvent les contenus émotionnels ou polarisants, au détriment de la rigueur journalistique. La loi du moindre effort est toujours de mise. Le risque de désinformation, de manipulation politique ou de perte de repères factuels est réel. Plusieurs experts suisses, dont Nic Newman cité par Le Nouvelliste et la RTS, soulignent que concentrer le débat public entre les mains de quelques géants technologiques représente une menace pour la diversité de l’information et, à terme, pour la démocratie.

En définitive, la migration des audiences vers les réseaux sociaux reflète moins un rejet pur des médias traditionnels qu’une adaptation à de nouvelles attentes culturelles et technologiques. Les plateformes numériques répondent à un besoin d’immédiateté et d’interaction que la presse ou la télévision peinent à offrir. Pourtant, leur domination croissante oblige à repenser la place de l’information professionnelle, garante de la vérification et de la nuance. L’avenir de l’information suisse dépendra sans doute de la capacité des médias à s’approprier ces nouveaux codes sans en perdre leur éthique — un équilibre délicat mais nécessaire pour préserver un espace public éclairé et crédible.

 

Sources

RTS

https://www.rts.ch/info/societe/2025/article/suisse-46-de-la-population-sous-informee-un-danger-pour-la-democratie-29040722.html?

https://www.rts.ch/info/societe/2025/article/reseaux-sociaux-et-influenceurs-la-nouvelle-ere-de-l-information-28920226.html

Jeune et médias

https://www.jeunesetmedias.ch/medias/reseaux-sociaux

Le Nouvelliste

 

https://www.lenouvelliste.ch/suisse/facebook-en-tete-les-communes-de-suisse-utilisent-de-plus-en-plus-les-reseaux-sociaux-1443897?